« La nature aime être cachée », écrit Héraclite (Phusis kruptesthaï phileï).
Phrase étonnante : la nature au contraire n’offre-t-elle pas à nos cinq sens des formes, des sons, des parfums innombrables, partout autour de nous, sans arrêt depuis des millénaires ? Que de phénomènes elle donne aux artistes à admirer, aux savants à étudier, que de matériaux, de ressources aux artisans, aux techniciens ! N’est-elle pas offerte partout, déployée sous nos yeux, disponible ?
Mais on constate que les sciences qui explorent la nature – physique, chimie, biologie – n’en ont jamais fini de faire de nouvelles découvertes et de s’apercevoir combien leur connaissance de la matière était incomplète. La nature reste cachée aux efforts de l’intellect. Et on se souvient que dans l’enseignement initiatique des temples de l’Égypte antique, il y avait une divinité toujours voilée, inaccessible aux regards. C’était Isis, l’épouse du dieu Osiris. À son propos, Omraam Mikhaël Aïvanhov a évoqué dans ses conférences la signification de cette allégorie.
Dans cette grande figure féminine, Isis, les Initiés ont vu un symbole de la nature primordiale, de laquelle sont sortis tous les êtres et tous les éléments de la création. Cette nature impénétrable pour l’homme ordinaire, les Initiés en ont fait leur principal objet d’étude. (1)
Le voile d’Isis, c’est le mystère de la nature vivante que nous n’avons pas encore réussi à pénétrer. (2)
Les humains ne voient donc que les apparences du mystère. La divinité se tient loin des regards et des atteintes irrespectueuses. L’étudiant d’une école initiatique travaille longuement à se dépouiller de tout sentiment vulgaire à l’égard de la nature (qui est féminine). Et lorsqu’il a purifié son cœur, selon la tradition il est admis à soulever le voile d’Isis, à contempler la vérité.
Celui qui par l’ascèse, la prière, le renoncement, sera capable d’obéir aux exigences de l’esprit verra apparaître devant lui Isis dépouillée de ses voiles. (3)
Parvenir à soulever un voile, à ôter un voile, tel est le but de l’Initiation. C’est l’origine de l’expression « soulever le voile d’Isis » transmise par la tradition. (1)
Élargissant presque à l’infini le symbole du voile d’Isis, le Maître Omraam explique aussi que toute chose dans la nature visible, matérielle, est le vêtement d’une entité invisible.
Le corps physique est le vêtement de l’âme et de l’esprit ; les paroles sont les vêtements de la pensée et du sentiment… Toutes les créatures visibles et invisibles possèdent des vêtements.
Une fleur par exemple est un vêtement où se cache une entité. C’est pourquoi il faut méditer sur les fleurs, leurs formes, leurs parfums, leurs couleurs, afin de connaître la nature des êtres qui possèdent de tels vêtements… Et méditer aussi sur tout ce qui existe dans les différents règnes de la nature, minéral, végétal, animal, humain…
Un cristal, un diamant, une pierre précieuse est le vêtement, le corps dans lequel une entité spirituelle s’est incarnée afin de se matérialiser. Les montagnes, les lacs, les rivières, les arbres… la nature entière est le vêtement de l’Esprit cosmique. (2)
Ainsi, le visible cache et révèle l’invisible. L’esprit se voile et se dévoile à travers la matière.
…Atteindre un tel degré d’amour que nous devenions voyants : c’est notre émerveillement qui rendra le voile de la déesse diaphane.
Omraam Mikhaël Aïvanhov
Collection Synopsis n° 3 « Et il me montra un fleuve d’eau de la vie » :
- (1) p. 390
- (2) p. 392
- (3) p. 393